8 janvier 2008
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16:59

Fin de cette série sur le cinéma chinois, sous forme de question. Comme pour la géographie, c’est une nouvelle fois la question de l’avenir de la Chine en général et de son cinéma en particulier qui m’intéresse ici, et ma réponse sera à double tranchant.
Le cinéma chinois émerge, incontestablement, au niveau mondial. Les films à gros budgets dépassent leurs frontières asiatiques traditionnelles et les recettes d’exploitation sont également excellentes aux Etats-Unis et en Europe. Citons par exemple Tigre et Dragon, Hero, Le Secret des Poignards Volants etc. Les films d’auteurs sont aussi particulièrement à l’honneur en Occident, avec les succès critiques de Still Life, Une Jeunesse Chinoise ou encore, pour coller à l’actualité, de Lust, Caution. Depuis quelques années, ces films remportent tous les prix dans les grands festivals de cinéma. Le fait que la plupart de ces films soient partiellement ou totalement censurés en Chine contribue en partie à cet attrait grandissant pour ce que les Chinois ont à nous dire de nous et d’eux-mêmes à travers leurs films. C’est un phénomène assez nouveau : nous parlons désormais du cinéma chinois avec admiration, nous connaissons les grands noms du moment et surtout, nous regardons des films chinois ! Le cinéma a donc accompagné la Chine dans son émergence sur le devant de la scène internationale, et d’ailleurs, le cinéma a sûrement participé à cette ouverte de la Chine moderne au monde.
Mais je remarque également l’effet inverse : si le monde s’est intéressé au cinéma chinois, quelques-uns des principaux meneurs du cinéma chinois sont désormais plus intéressés par ce qui se passe en dehors de chez eux. Côté réalisateurs, citons John Woo (Volte-Face, Mission Impossible 2 etc.), Ang Lee (Le Secret de Brokeback Mountain) ou encore Wong Kar-Wai (My Blueberry Nights). Côté acteurs, Maggie Cheung multiplie les films en Français, Jackie Chan est une star d’Hollywood, Michelle Yeoh a été James Bond Girl dans Demain Ne Meurt Jamais, Jet Li a plus tourné aux Etats-Unis qu’en Chine ces dernières années. Bref, une partie du cinéma chinois se détourne de la Chine pour mettre son savoir-faire au profit d’autres histoires, d’autres pays. Ce n’est pas uniquement une question d’argent, car il suffit de voir les salaires des acteurs du film de cette fin d’année, The Warlords, pour comprendre que la Chine, notamment par le biais d’Hong Kong et de Taiwan, a les moyens de financer de très grosses productions. De plus, la plupart des acteurs du moment sont issus du monde de la musique, où ils ont déjà acquis fortune et notoriété (Andy Lau, Jay Chou dans La Cité Interdite, Wang Lihong dans Lust, Caution etc.)
En revanche, le problème vient peut-être du contenu des films eux-mêmes, ou plutôt de son contrôle. Si globalement je pense que les médias occidentaux se font beaucoup de fantasmes sur la censure gouvernementale en général, le cinéma est l’un des domaines où elle est réellement puissante. Il suffit de prétexter un érotisme trop cru pour écarter définitivement un film comme Une Jeunesse Chinoise de son public national. Vous avez eu une nouvelle illustration de ce problème avec le récent Lost in Beijing, un film qui décrit la vie précaire d’un couple de travailleurs pauvres dans la future capitale olympique. L’argument du sexe à l’écran a permis de restreindre la diffusion de cette image de Pékin qu’on ne saurait voir. Une nouvelle fois, c’est par l’intermédiaire de sites Internet français ou anglophones que je l’ai appris, car ici en Chine, le flot de nouvelles sorties, qui contient le même lot de grosses productions américaines qu’en France, laisse ce discret exercice de censure inaperçu des masses chinoises. Pour ces cinéastes chinois qui n’ont pas choisi de s’exiler ou de parler d’autre chose dans leurs films, il faut donc se contenter des lauriers internationaux, et compter sur les petits magasins de DVD pirates pour diffuser leur message sous le manteau.
Le bilan de cette série sur le cinéma chinois est donc contrasté. Il y a indubitablement une grande richesse et une grande qualité dans ce pays et ses artistes. Mais il est difficile de prévoir l’avenir, même à court ou moyen terme, du cinéma chinois : vont-ils accepter les ponts d’or d’Hollywood et ses sujets aseptisés, ou vont-ils continuer à jouer avec la censure pour proposer un regard différent sur leur pays et ses changements (en bien ou en mal) ? Ou bien les deux ? Pour notre plus grand bonheur de cinéphiles sinophiles !
Le cinéma chinois émerge, incontestablement, au niveau mondial. Les films à gros budgets dépassent leurs frontières asiatiques traditionnelles et les recettes d’exploitation sont également excellentes aux Etats-Unis et en Europe. Citons par exemple Tigre et Dragon, Hero, Le Secret des Poignards Volants etc. Les films d’auteurs sont aussi particulièrement à l’honneur en Occident, avec les succès critiques de Still Life, Une Jeunesse Chinoise ou encore, pour coller à l’actualité, de Lust, Caution. Depuis quelques années, ces films remportent tous les prix dans les grands festivals de cinéma. Le fait que la plupart de ces films soient partiellement ou totalement censurés en Chine contribue en partie à cet attrait grandissant pour ce que les Chinois ont à nous dire de nous et d’eux-mêmes à travers leurs films. C’est un phénomène assez nouveau : nous parlons désormais du cinéma chinois avec admiration, nous connaissons les grands noms du moment et surtout, nous regardons des films chinois ! Le cinéma a donc accompagné la Chine dans son émergence sur le devant de la scène internationale, et d’ailleurs, le cinéma a sûrement participé à cette ouverte de la Chine moderne au monde.
Mais je remarque également l’effet inverse : si le monde s’est intéressé au cinéma chinois, quelques-uns des principaux meneurs du cinéma chinois sont désormais plus intéressés par ce qui se passe en dehors de chez eux. Côté réalisateurs, citons John Woo (Volte-Face, Mission Impossible 2 etc.), Ang Lee (Le Secret de Brokeback Mountain) ou encore Wong Kar-Wai (My Blueberry Nights). Côté acteurs, Maggie Cheung multiplie les films en Français, Jackie Chan est une star d’Hollywood, Michelle Yeoh a été James Bond Girl dans Demain Ne Meurt Jamais, Jet Li a plus tourné aux Etats-Unis qu’en Chine ces dernières années. Bref, une partie du cinéma chinois se détourne de la Chine pour mettre son savoir-faire au profit d’autres histoires, d’autres pays. Ce n’est pas uniquement une question d’argent, car il suffit de voir les salaires des acteurs du film de cette fin d’année, The Warlords, pour comprendre que la Chine, notamment par le biais d’Hong Kong et de Taiwan, a les moyens de financer de très grosses productions. De plus, la plupart des acteurs du moment sont issus du monde de la musique, où ils ont déjà acquis fortune et notoriété (Andy Lau, Jay Chou dans La Cité Interdite, Wang Lihong dans Lust, Caution etc.)
En revanche, le problème vient peut-être du contenu des films eux-mêmes, ou plutôt de son contrôle. Si globalement je pense que les médias occidentaux se font beaucoup de fantasmes sur la censure gouvernementale en général, le cinéma est l’un des domaines où elle est réellement puissante. Il suffit de prétexter un érotisme trop cru pour écarter définitivement un film comme Une Jeunesse Chinoise de son public national. Vous avez eu une nouvelle illustration de ce problème avec le récent Lost in Beijing, un film qui décrit la vie précaire d’un couple de travailleurs pauvres dans la future capitale olympique. L’argument du sexe à l’écran a permis de restreindre la diffusion de cette image de Pékin qu’on ne saurait voir. Une nouvelle fois, c’est par l’intermédiaire de sites Internet français ou anglophones que je l’ai appris, car ici en Chine, le flot de nouvelles sorties, qui contient le même lot de grosses productions américaines qu’en France, laisse ce discret exercice de censure inaperçu des masses chinoises. Pour ces cinéastes chinois qui n’ont pas choisi de s’exiler ou de parler d’autre chose dans leurs films, il faut donc se contenter des lauriers internationaux, et compter sur les petits magasins de DVD pirates pour diffuser leur message sous le manteau.
Le bilan de cette série sur le cinéma chinois est donc contrasté. Il y a indubitablement une grande richesse et une grande qualité dans ce pays et ses artistes. Mais il est difficile de prévoir l’avenir, même à court ou moyen terme, du cinéma chinois : vont-ils accepter les ponts d’or d’Hollywood et ses sujets aseptisés, ou vont-ils continuer à jouer avec la censure pour proposer un regard différent sur leur pays et ses changements (en bien ou en mal) ? Ou bien les deux ? Pour notre plus grand bonheur de cinéphiles sinophiles !